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« Coups de poignard » au Downing Street, numéro 11

photo_camera Boris Johnson, primer ministro Reino Unido

Une Saint-Valentin sanglante a eu lieu au sein du gouvernement Boris Johnson. Trop de sorties et d'entrées dans le remodelage du Cabinet du Premier ministre. Ce qui s'est passé au cours des dernières heures montre que Johnson veut que tous ses collaborateurs soient loyaux au maximum, qu'il n'y a ni de fissure dans le soutien et la reconnaissance du leader ni dans le degré d'implication avec sa figure et de ses politiques imminentes. Et dans ce nouveau scénario émerge la figure éternelle de l'homme dans l'ombre, celle qui chuchote à l'oreille du patron, celle qui promeut chacune des décisions qui s'articulent dans l'action d'un gouvernement. En Espagne, nous avons le néo-progressiste Iván Redondo, au Royaume-Uni le nom de Dominic Cummings est forgé de nos jours, qui gère vraiment de manière subliminale, jamais sous les projecteurs, la politique du cabinet du Premier ministre. 

Il a nommé certains des conseillers influents du portefeuille de l'économie, et c'est quelque chose qui, en politique, ne peut pas être accepté par ceux qui en souffrent : si on n’a pas la confiance de celui qui est au sommet pour qu’on s’entoure de notre équipe, celui qu’on choisit, mieux vaut le laisser à temps. Sajid Javid, jusqu'à hier ministre des Finances, a remis sa démission quelques jours avant de devoir rendre compte des budgets, chose inouïe dans la vie publique britannique. Cummings a dépassé son domaine, il a influencé ses relations avec le Premier ministre en y mettant des obstacles, et, enfin, il a exécuté sa revanche en s'emparant du pouvoir du 11 Downing Street, siège du chancelier ou ministre des Finances, via la nomination de collaborateurs. Les combats constants entre les deux ont entraîné la rupture de la corde, comme toujours, du côté le plus faible, bien que cette fois, la faiblesse soit celle de la force et du pouvoir extraordinaires qui ont qui occupe le poste de « Her Majesty’s Exchequer ».

Maintenant, on pourrait confirmer que ce sera le cabinet du Premier ministre qui décidera de la composition des budgets. Le chiffre 10 est imposé le 11. Mais les blessures laissées par la guerre de pouvoir qui s'est déroulée dans les coulisses depuis la victoire de Boris le 12 décembre dernier sont trop profondes. Cummings, l'homme qui a promu le Brexit en menant la campagne « Vote Leave » pour la sortie, restera le Machiavel qui bouge les fils dans l'ombre. Et Rishi Sunak occupera le poste de chancelier et, bien sûr, laissera que le 10 de Downing Streeet manipule à volonté le nombre et les noms de tous ces conseillers qui sont incorporés. Si Javid ne pouvait pas se regarder dans le miroir tous les matins au cas où il accepterait qu'un plombier le nomme à ses postes élevés, il faut donc penser que Sunak ne pourra pas le faire non plus. Et il a déjà des preuves claires de la façon dont le « Redondo britannique » agi. Il a travaillé chez Goldman Sachs, ce qui, par exemple, au gouvernement espagnol serait une stigmatisation qui le condamnerait aux galères. Mais tout ce qu'il a appris dans la City et l'héritage humaniste reçu de sa famille d'immigrants de l'Inde n’est pas comparable à ce qu'il vivra avec Cummings.

Le remodelage du Cabinet Boris Johnson a également laissé d'autres nominations et départs. Michael Gove sera ministre du Cabinet, ce qu’on pourrait considérer comme le vice-président des pleins pouvoirs avec le chef. Dominic Raab demeure ministre des Affaires étrangères, le puissant Foreign Office. Suella Braverman, une passionnée radicale du Brexit sera avocate de l’État et Priti Patel sera responsable de l'Intérieur. Alok Sharma sera secrétaire au Département des Affaires, de l'Énergie et des Stratégies industrielles et sera chargé d'organiser la conférence COP-26 à Glasgow en novembre prochain. George Eustice occupera l'Environnement, l'Alimentation et les Affaires Rurales. Oliver Dowden sera le secrétaire de l'État de la Politique Numérique, de la Culture, de la Communication et des Sports. Anne Marie Trevelyan occupera le Développement International.    

Et parmi ceux qui sont « tombés » dans cette guerre de poignards à la veille de Saint-Valentin, se trouvent des noms bien connus tels que Julian Smith, jusqu'ici responsable des questions liées à l'Irlande du Nord, dont les liens avec Johnson ont été définitivement rompus à la suite du départ de l'UE. Parallèlement, Geoffrey Cox abandonne le Bureau de l'Avocat général de l’État, brisé par les soupçons de Johnson quant à son implication limitée dans son projet. Maintenant, il continuera, comme il l'a annoncé dans sa lettre de démission, à défendre les intérêts de ses représentants dans les circonscriptions de Torridge et de West Devon.