La criminalité de haut vol
Alors que de nombreuses personnes meurent du coronavirus, d'autres sont très vivantes qui prospèrent grâce à la pandémie. Chaque jour, nous recevons des courriels d'amis et de collègues nous alertant sur les astuces utilisées par des cyberdélinquants de différents bords pour profiter de la situation dramatique que la pandémie a entraînée pour les familles, les entreprises et les institutions. Ce sont des criminels de second ordre.
Certaines de leurs ruses sont relativement faciles à détecter, mais d'autres volent plus haut et sont commises par les niveaux les plus variés de la société, y compris les autorités publiques. Le gâchis que nous connaissons en Espagne avec la saisie, effectuée par la Turquie, d'une cargaison de respirateurs artificiels acquis et payés par les autorités régionales de Castilla La-Mancha et de Navarre pour répondre d'urgence à des besoins de vie et de mort, en est un exemple. Ou plutôt, une alerte.
Un exemple révélateur de l'absence de scrupules, même de la part de certains gouvernements, d'un acte de piraterie est celui perpétré par la Turquie - membre de l'OTAN et aspirant membre de l'Union européenne -, qui a enlevé la cargaison clinique de besoin vital d'un avion chinois à destination de Madrid. L'explication donnée par le gouvernement turc, au milieu d'arguments bureaucratiques incohérents, a presque aggravé l'image déplorable de l'incident.
C'était une raison aussi forte que blessante pour la sensibilité humaine. Nous avons besoin d'eux, sont-ils venus dire ; quand nous pourrons nous en passer, nous les enverrons sur le chemin. On peut comprendre que, face au risque de la mort des autres, qui n'est rien d'autre, c'est d'abord moi. Nous entrons dans le monde du « chacun pour soi ». Argument provocateur. Le pire, c'est qu'il reflète la lutte qui a commencé dans cette guerre pour obtenir les remèdes en les retirant aux autres.
Il est prouvé que certains équipements cliniques sont vendus aux enchères au plus offrant (sans compter qu'il peut s'agir d'un cas de tricherie avec du faux matériel comme cela s'est produit avec les tests chinois). La vie a commencé à faire des ravages, et les pays riches et leurs citoyens auront toujours des avantages insurmontables lorsque leur vie sera en danger. Le sérieux qui doit présider aux activités commerciales internationales doit être revu de toute urgence.
L'Espagne ne pouvait rester impassible face au pillage officiel qu'elle a failli subir à l'aéroport d'Ankara. Après des heures de doutes, de contradictions et de négociations acharnées, la force de la raison s'est imposée et il semble que les respirateurs seront entre les mains de leurs acheteurs dès lundi. Les organisations internationales, de l'OTAN à l'OMS, ne peuvent laisser cette alerte tomber dans l'oreille d'un sourd : la pandémie est une menace universelle à laquelle il faut ajouter la tentation usuraire et criminelle de ceux qui, sans scrupules, tentent, et tenteront encore et encore, d'en faire une gigantesque opportunité de faire des affaires.