Base militaire nigériane : saisie par l'État islamique et reprise par l'armée 48 heures plus tard
Vendredi dernier, la province de l'État islamique d'Afrique de l'Ouest (ISWAP) aurait réussi à s'emparer d'une base de l'armée nigériane. L'assaut a pu être mené à bien en quelques heures. Lors de la prise de la base de Mars, dans l'État de Borno au nord-est du pays, des affrontements ont éclaté entre l'armée et les djihadistes de l'ISWAP, tuant plusieurs soldats et provoquant la disparition de plusieurs autres. Le groupe djihadiste a annoncé que pendant l'attaque, ils ont tué sept soldats nigérians, en ont capturé huit et ont volé des munitions et des véhicules, brûlant la caserne de la base. Ces informations n'ont pas pu être vérifiées. Ce qui a attiré l'attention sur la saisie de la base est que, selon une source militaire anonyme recueillie par l'AFP, les djihadistes sont arrivés dans des camions militarisés. La base de Mars a également été attaquée il y a moins de deux semaines par des membres du groupe ISWAP. Cette tentative a été repoussée par les forces de sécurité nigérianes, si bien que pour cette deuxième fois, les djihadistes se sont assurés d'apporter plus de troupes et de matériel. Selon des sources militaires, la première attaque était en représailles des opérations réussies que l'armée nigériane a menées dans la ville de Talala, connue pour être le deuxième plus important bastion de l'ISWAP dans la région.
Malgré une déclaration publiée dimanche par l'armée nigériane qui prétend avoir neutralisé tous les djihadistes, l'État islamique a eu accès au matériel militaire de l'armée, aujourd'hui presque entièrement détruit. L'opération Tura Takaibango, lancée le 7 janvier dernier pour le nord-est du pays, a permis de reprendre la base de l'Etat de Borno, en collaboration avec l'armée de l'air nigériane. Cette opération, selon le communiqué de l'armée nigériane, a permis de détruire les sept camions militarisés et de neutraliser la plupart des djihadistes qui avaient pris le contrôle de la base. Les terroristes ont quitté la ville où se trouve la base, Marte, d'où des centaines de civils pris entre deux feux avaient fui ce week-end.
Malgré les opérations anti-terroristes constantes de l'armée nigériane accompagnée des milices d'autodéfense (la Civilian Joint Task Force - CJTF), au cours des derniers mois, les attaques terroristes au Nigeria se sont intensifiées sur les fronts ISWAP et Boko Haram. Les deux groupes se déplacent le long des frontières nord. Nous rappelons qu'en décembre dernier, 600 enfants ont été enlevés par Boko Haram dans l'État de Katsina, dans le nord-ouest du pays. La présence de ces deux groupes au Nigeria et la perméabilité des frontières avec les pays voisins posent un problème de sécurité régional, car les groupes djihadistes profitent du contrôle difficile de la frontière pour mener des attaques dans les zones les plus proches d'eux.
Boko Haram et ISWAP étaient à l'origine le même groupe, jusqu'à leur scission en 2016. Depuis lors, ils opèrent séparément et, contrairement à ce qui se passe entre le JNIM, lié à Al-Qaida et l'État islamique du Grand Sahara au Sahel, ou au Moyen-Orient, il n'y a pas d'affrontements directs entre les deux factions. En fait, il arrive que ni les médias ni les militaires ne fassent la distinction entre eux. Le chef du Boko Haram, Abubakar Shekau, a prêté allégeance à l'État islamique en 2015, mais un an plus tard, lorsque Daesh a décidé de nommer al-Barnawi à la tête de la province de l'État islamique d'Afrique de l'Ouest (ISWAP), désormais rebaptisée, Abubakar Shekau a refusé, divisant l'ISWAP entre les partisans d'al-Barnawi et ceux qui suivaient Abubakar Shekau, dont le nom est revenu à Boko Haram en août 2016.
