L'AJE envoie une lettre aux principales institutions du continent pour protéger les professionnels de l'information contre les mesures restrictives de certains gouvernements

La crise du coronavirus menace la liberté de la presse en Europe

PHOTO/ Eduardo Muñoz Álvarez/Getty Images/AFP - Journalistes lors d'une conférence de presse

La pandémie mondiale de COVID-19 a des conséquences sur de nombreux fronts. La situation exceptionnelle que traversent de nombreux pays dans le monde fait que les administrations publiques adoptent des trains de mesures très restrictifs sur des aspects tels que la circulation des citoyens ou l'activité des entreprises.

Cependant, certains gouvernements profitent de la situation actuelle pour introduire des mesures qui compromettent sérieusement le droit des journalistes à rendre compte de la crise en cours. De même, le droit des citoyens à recevoir des informations véridiques est également mis à mal. L'Association des Journalistes Européens (AJE), avec d'autres organismes représentant les travailleurs de la presse au niveau continental, a envoyé une lettre aux principaux dirigeants de la Communauté et du Conseil de l'Europe pour les alerter de cette situation.

La lettre est adressée à Ursula von der Leyen, Charles Michel et David Maria Sassoli, respectivement présidents de la Commission, du Conseil et du Parlement européen. La lettre doit également être envoyée au Secrétaire général du Conseil de l'Europe, la Croate Marija Pejcinovic Buric. En plus de l'AJE, il est signé par Reporters sans frontières (RSF) et le Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (ECPMF, par son acronyme en anglais), entre autres.

Dans le texte, les associations de presse citent notamment l'exécutif hongrois du parti d'extrême droite Fidész. Le gouvernement dirigé par Viktor Orbán prépare actuellement une loi qui permettra d'imposer des peines allant jusqu'à cinq ans de prison à ceux qui publient de fausses nouvelles sur la crise du coronavirus et sa gestion. Toutefois, cette prémisse va bien au-delà d'un effort de lutte contre la désinformation. 

El primer ministro húngaro Viktor Orbán

Au cours des dernières années, le gouvernement hongrois a plutôt qualifié de « fake news » un grand nombre de publications de presse indépendantes qui critiquent la dérive totalitaire du Premier ministre. On peut donc supposer que la manœuvre de Budapest n'est rien d'autre qu'un stratagème légal pour continuer à saper la capacité des journalistes à travailler librement dans le pays.

« Si elle est adoptée, cette nouvelle loi donnera au gouvernement hongrois un instrument commode pour menacer les journalistes et les pousser à l'autocensure. Nous craignons qu'il s'agisse d'un pas vers la répression complète de la liberté de la presse en Hongrie, qui pourrait durer au-delà de la pandémie », indique le communiqué de presse. 

La lettre cite également deux autres pays de l'Union européenne, la République tchèque et la Slovénie, comme deux exemples d'administrations qui ont limité de manière drastique l'accès des professionnels des médias aux conférences de presse de haut niveau. En outre, le développement d'applications permettant de surveiller la propagation du virus suscite certaines inquiétudes : « Bien que nous comprenions les avantages potentiels, l'utilisation de la surveillance doit être correctement contrôlée. ... La surveillance incontrôlée met en péril les droits à la vie privée et à la protection des données, tandis que la capacité des journalistes à protéger leurs sources est sapée ».  

« À l'heure où les droits fondamentaux des citoyens sont suspendus partout en Europe, la nécessité d'un contrôle des médias pour s'assurer que ces nouveaux pouvoirs ne sont pas utilisés de manière abusive est plus forte que jamais », ajoute le texte.  

Les associations de journalistes appellent les institutions européennes à déclarer que le journalisme et la libre circulation de l'information sont essentiels à l'effort de l'Europe pour contenir la pandémie COVID-19. En outre, ils exigent qu'ils expriment clairement leur rejet des mesures restrictives prises par le gouvernement hongrois sous le prétexte de la pandémie, ainsi que d'appeler les différents responsables à garantir le plein accès des professionnels de la presse aux postes pertinents lors de leurs apparitions publiques.

La Hongrie n'est en aucun cas le premier pays à adopter des lois qui punissent sévèrement les journalistes dans le cadre de cette crise. La Turquie - qui fait partie du Conseil de l'Europe - a arrêté 19 personnes il y a deux semaines pour avoir prétendument posté des « publications non fondées et provocantes » sur COVID-19 sur divers réseaux sociaux. En réalité, ces utilisateurs disaient que le virus s'était propagé sans que le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan ait pris les mesures nécessaires pour l'empêcher.

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