Des ventes aux enchères sont organisées dans d'anciennes régions rebelles comme Idlib

Le gouvernement syrien exproprie les terres des citoyens qui ont quitté le pays à cause de la guerre

PHOTO/SANA - Photo d'archive du 15 novembre 2019 montrant le président syrien Bachar al-Asad

Depuis leur exil au lendemain de la guerre civile qui a ravagé le pays, certains agriculteurs syriens assistent avec étonnement à la saisie de leurs anciennes exploitations familiales par le gouvernement syrien, qui procède alors à leur vente aux enchères. 

Les autorités locales du nord-ouest du pays, toujours aux mains du gouvernement, sont responsables de l'organisation de ces ventes aux enchères de terres fertiles. 

Salman, un réfugié syrien qui a quitté la région d'Idlib après une offensive du gouvernement syrien il y a un an, et qui vit maintenant en Grèce, a exprimé son mécontentement à l'agence AFP : "De quel droit quelqu'un peut-il venir et le prendre ? L'espoir de retourner sur sa terre s'est évanoui lorsqu'il a appris que les droits de la cultiver avaient été vendus à quelqu'un d'autre. 

C'est par le biais d'un affichage sur les médias sociaux qu'il a découvert la vente aux enchères de son ancienne ferme. "Cette terre nous a été léguée par nos ancêtres et nous voulons la transmettre à nos enfants", a déclaré le réfugié de 30 ans.  

D'autres agriculteurs de régions comme Hama et Alep, qui sont adjacentes à Idlib, voient également avec consternation, de loin, comment ils ne pourront jamais retourner sur leurs terres. Grâce au compte Facebook du syndicat des agriculteurs, qui est affilié au gouvernement Al-Asad, ou de connaissances qui vivent encore à proximité, ils apprennent tôt ou tard l'expropriation de leurs parcelles. 

Selon l'Union, la saisie est justifiée par le fait que les détenteurs originaux des titres étaient endettés auprès de la Banque coopérative agricole syrienne (SACB), qui offre des prêts aux agriculteurs. Cependant, tous les agriculteurs qui se sont adressés à l'AFP ont nié avoir des arriérés de paiement et ont affirmé que "ce n'est qu'une excuse".

Avec cette action, Damas vise à stimuler la production agricole en pleine crise économique aggravée par les sanctions auxquelles elle doit faire face, en profitant du fait que seulement 235 000 des près d'un million de personnes qui ont quitté les régions du nord-ouest sont revenues, selon les données de l'ONU. 

Des organisations de défense des droits de l'homme telles qu'Amnesty International ont condamné les ventes aux enchères de terres dans d'anciens bastions rebelles. Diana Semaan, chercheuse d'une ONG en Syrie, a déclaré que les autorités syriennes "violaient le droit international". 

Le juge Anwar Mejni, expert juridique de l'ONG Al Yum al-Tali et membre d'une commission constitutionnelle parrainée par les Nations unies dans le cadre des négociations pour une solution négociée à la guerre, a également dénoncé ces procédures "illégales". 

Il considère qu'il s'agit "d'une violation du droit à l'exploitation" et qu'il s'agit de "représailles contre les Syriens qui ont quitté leurs régions", en bref, "d'une vengeance contre l'opposition". Selon le juge, si la Banque du Crédit Agricole organise réellement les ventes aux enchères pour régler les dettes, celles-ci auraient dû être supervisées par les tribunaux car "il existe des lois qui réglementent ces situations. 

Un autre agriculteur, Abu Adel, a quitté Hama en 2012 lorsque les combats dans la région se sont intensifiés, bien qu'il ait continué à visiter ses terres de façon sporadique jusqu'à ce que le gouvernement syrien reprenne le contrôle. Il a engagé plusieurs personnes pour s'en occuper, mais elles ont finalement été vendues aux enchères à un membre du comité de sécurité local

Un cas similaire à celui d'Amir, un homme de 38 ans vivant à Alep, dont les terres ont été remises à des parents d'un membre des services de renseignement. Il ne servait à rien de demander à un voisin de faire une offre en son nom, car il refusait de le faire par peur.

Atalayar_escombros en Idlib
Tout a commencé avec la loi dite "loi 10" promulguée en 2018

La loi sur la propriété décrétée par le gouvernement Al-Asad en 2018 a été le point de départ de ces expropriations arbitraires qui visent à condamner les opposants à l'exil et à laisser les villes et villages où ils étaient autrefois majoritaires aux mains des loyalistes de Damas. 

La loi prévoit un délai de 30 jours à compter du 11 avril 2018 pour présenter les actes de propriété aux bureaux municipaux ou, à défaut, pour qu'un parent le fasse. La situation est compliquée par le fait qu'en raison de la guerre, ces papiers ont été perdus ou détruits. Une fois le délai passé, l'État a procédé à la confiscation et à la vente aux enchères des biens. 

De nombreux Syriens ne pouvaient pas et ne voulaient pas retourner dans leur pays par crainte de représailles. Même si les actes étaient présentés au bureau municipal, ils devaient être approuvés par les responsables de la sécurité. Un danger pour ceux qui n'ont pas communié avec Al Assad. 

La loi a été promulguée après la reconquête de East Gut, un bastion des rebelles en dehors de Damas, et s'inspire d'une loi similaire mise en œuvre au Liban après la guerre civile.

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