Le procureur général du Liban, Ghassan Oueidat, a ordonné mercredi la libération de toutes les personnes détenues dans le cadre de l'explosion de 2020 qui a fait plus de 200 morts et 6 500 blessés à Beyrouth, portant ainsi un nouveau coup à une enquête qui a été entravée à plusieurs reprises.
"Nous avons décidé de libérer, sans exception, tous les détenus dans l'affaire de l'explosion du port de Beyrouth et de leur interdire de voyager, en les mettant à la disposition du Conseil judiciaire au cas où il se réunirait et en informant toute personne nécessaire", peut-on lire dans une notification signée par Oueidat.
Lundi dernier, le juge chargé de l'enquête sur la déflagration, Tarek Bitar, a décidé de sa propre initiative de reprendre le processus après plus d'un an de suspension en raison d'une série de plaintes déposées par d'anciens hauts fonctionnaires soupçonnés de négligence dans l'affaire.
Parallèlement, l'enquêteur judiciaire a ordonné la libération de cinq des 17 détenus en relation avec la tragédie et a appelé un certain nombre de suspects à témoigner au début du mois prochain, dont Oueidat lui-même, l'ancien Premier ministre Hassan Diab et deux hauts fonctionnaires libanais.
Toutefois, le ministère public estime que Bitar a toujours les mains "liées" dans l'affaire de l'explosion, de sorte que le processus ne dispose pas d'un juge pouvant statuer sur les recours déposés par les personnes détenues "depuis plus d'un an" dans son cadre, selon l'avis publié aujourd'hui.
Dans ces circonstances, l'Oueidat a décidé d'ordonner la libération des 17 suspects sur la base de l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui consacre le droit à la liberté des détenus.
"Toute personne arrêtée du chef d'une infraction pénale doit être traduite dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires et doit avoir le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou libérée", peut-on lire dans le pacte adopté par l'ONU en 1966.
Les organisations de défense des droits de l'homme ont accusé d'anciens hauts fonctionnaires soupçonnés d'avoir fait obstruction à l'enquête sur l'explosion, et ont demandé une enquête internationale sur l'absence de progrès dans le processus national deux ans et demi après la tragédie.