La stratégie d'Al-Sisi : réduire la dépendance des armes vis-à-vis des États-Unis

Le silence sur les armes : le pacte secret de l'Egypte avec l'Europe

PHOTO/REUTERS - Le président égyptien Abdel Fattah al-Sisi

Les vestiges de ce que l'on a appelé le "Printemps arabe" continuent de faire des vagues dans l'Égypte aride. Depuis que le général Abdel Fattah al-Sisi est devenu président du pays après avoir pris le pouvoir à la suite d'un coup d'État en 2013, l'Égypte s'est engagée dans une démarche de réarmement et d'établissement de liens solides avec ses "voisins" européens. 

En fait, à partir du moment où Al Sisi a été " couronné " comme président de l'Égypte (2014), les pays de l'UE et le Royaume-Uni ont commencé à augmenter leurs ventes d'armes, concurrençant directement les États-Unis, le plus grand fournisseur du pays jusqu'à présent1.   

Au total, entre 2013 et 2020, des licences d'armement d'une valeur de 11 milliards de dollars, soit environ 10,83 milliards d'euros, ont été exportées, et au moins 54 contrats de vente d'armes, sur les 75 préétablis, ont été conclus - entre 2014 et 2019-. Le chiffre total des dépenses militaires du pays s'élève à 13,5 milliards d'euros. Cela a fait de l'Égypte le troisième plus grand importateur d'armes au monde et le deuxième au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, après l'Arabie saoudite2.  

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Toutefois, outre les pays européens et le Royaume-Uni, la Russie et la Chine ont également rejoint la course aux armements en Égypte. Cependant, le principal pays avec lequel Al-Sisi a entretenu et continue d'entretenir des relations fortes est sans aucun doute la France, qui est devenue entre 2010 et 2019 le principal fournisseur d'armes du pays - avec la Russie - pour un montant de plus de 7,5 milliards d'euros. Parmi les armes vendues au pays arabe figurent 16 missiles Super-530D ou 500 missiles air-sol et une frégate FREMM équipée de 15 missiles antinavires, entre autres exemples. 

Toutefois, l'acquisition la plus récente a eu lieu en mai dernier. La France a ensuite confirmé la vente de 30 chasseurs Dassault Rafale. Il s'agit d'un avenant au contrat signé en 2015 et qui, comme alors, comprend la livraison des équipements associés. En d'autres termes, un lien de plus en plus étroit s'est progressivement tissé entre l'Europe et le ministère égyptien de la défense. Concrètement, les avions de chasse arriveront sur le sol pharaonique au cours des trois prochaines années et le montant total de leur vente s'élève à 3,95 milliards d'euros, selon le quotidien français Disclose. 

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L'objectif d'Al-Sisi

La stratégie de l'ancien maréchal vise avant tout à moderniser l'armée égyptienne et à réduire ainsi sa dépendance, encore mineure, vis-à-vis des États-Unis. 

Malgré le fait que le Fonds monétaire international ait dû intervenir à deux reprises pour sauver le pays de la faillite, Al-Sisi continue de donner la priorité à la politique de défense sur tous les ministères.

Bien que l'Égypte ait un mauvais bilan en matière de droits de l'homme, il est légitime de se demander si elle est parvenue à réformer ses relations avec les gouvernements européens par le biais de ce que l'on appelle déjà le traité "Silence pour les armes". 

Dans ce contexte, il convient de noter que l'UE a besoin des centaines de milliers de réfugiés étrangers que l'Égypte a acceptés en échange de contrats d'armement. En effet, selon un document divulgué au média arabe Middle East Eyes, daté de 2017, Sameh Shoukry, alors chef du bureau du ministère des Affaires étrangères, a même rédigé des notes liant les besoins en armes de l'Égypte à l'accord, spécifiquement en dehors du document officiel qui a ensuite été signé.

En 2020, année où l'Europe était en pleine pandémie de COVID-19, le président français Enmanuel Macron a déclaré qu'il ne conditionnerait pas les ventes d'armes à l'Égypte aux droits de l'homme, car son objectif n'était pas d'affaiblir la capacité militaire du pays dans la région. 

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Après l'annonce de Macron, la France a signé un autre contrat de 4 milliards d'euros en 2021, ajoutant 30 autres avions de chasse. 

De son côté, l'Allemagne a augmenté ses ventes d'armes à l'Égypte de pas moins de 205 % depuis 2013, selon l'Institut Tahrir pour la politique du Moyen-Orient. En 2020, l'Italie a signé avec l'Égypte un accord de 10 milliards d'euros prévoyant l'achat de six frégates 24 M3, de 24 avions de combat Eurofighter Typhoon, d'un satellite militaro-industriel et de 20 lanceurs de missiles Fajal II OPV. 

L'Espagne a exporté plus de 50 millions d'euros d'armes vers l'Égypte depuis 2012 et a approuvé jusqu'à 46 licences d'exportation d'armes. Elle a également ajouté 93 millions d'euros à la somme ci-dessus au cours des dernières années. En outre, en 2021, le fabricant d'armes EM&E a signé un accord pour fournir des armes navales et guidées à l'Égypte. 

Enfin, le Royaume-Uni, qui ne fait plus partie de l'Union européenne depuis le Brexit, est également impliqué dans ce "traité", fournissant à l'Égypte du matériel militaire, notamment des mitrailleuses, des hélicoptères et des pièces pour les véhicules de combat. 

L'Égypte est définitivement devenue un marché clé pour l'industrie de la défense en Europe, notamment pour les exportations d'armes, après tout : Les affaires sont les affaires, comme le diraient les Anglo-Saxons.

Références :

1 - Jusqu'en 2009, 75 % de l'équipement militaire du pays dépendait uniquement des États-Unis. Depuis 2013, ce pourcentage est tombé à 23 %, selon les données du SIPRI.

2 - Dont les dépenses militaires sont apparemment 17 fois supérieures à celles de l'Égypte.

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