Le nouveau ministre des Affaires étrangères, qui remplace le vétéran Ramtane Lamamra, a pour objectif d'approfondir les relations tendues de l'Algérie avec le monde arabe

Ahmed Ataf, chargé de redynamiser la diplomatie algérienne

photo_camera PHOTO/MFA ALGERIA - L'ancien ministre des affaires étrangères Ramtane Lamamra passe le relais à son successeur, Ahmed Ataf

Ahmed Ataf a pris les rênes de la diplomatie algérienne à la mi-mars, suite à la démission surprise du vétéran Ramtane Lamamra, architecte de la rupture bilatérale avec le Maroc en août 2021. Le nouveau ministre des Affaires étrangères, nommé dans le cadre d'un vaste remaniement ministériel qui a touché 11 des 30 portefeuilles, a été chargé de renforcer la position de l'Algérie dans le monde arabe. "Nous vivons des transformations majeures qui nous obligent à nous adapter", a-t-il reconnu quelques minutes après sa prise de fonction. 

Pour ce faire, Ataf a lancé une série de contacts diplomatiques avec ses homologues tunisien, Nabil Ammar, mauritanien, Mohamed Salem Ould Marzouk, émirati, Sheikh Abdullah bin Zayed, égyptien, Sameh Shoukry, saoudien, Faisal bin Farhan, jordanien, Ayman Safadi, soudanais, Ali Sadiq Ali, et libyen, Najla Mangoush. Cette hyperactivité diplomatique met en lumière la priorité du nouveau ministre : le renforcement des relations avec les pays arabes. 

Mais il y a d'autres dossiers sur la table auxquels Ataf devra prêter attention. L'âpre rivalité avec le Maroc et le fossé diplomatique avec l'Espagne sur le conflit du Sahara occidental, le blocage du processus de réconciliation avec la France et l'instabilité au Sahel en sont quelques-uns. Tebboune cherchait un profil solvable pour remplacer le départ prématuré de Lamamra, un diplomate expérimenté capable de réorganiser le ministère. L'un des noms était le sien.

Ataf est une vieille connaissance. Diplômé de l'Ecole Nationale d'Administration (ENA), école des hauts fonctionnaires de l'Etat, il a d'abord occupé le portefeuille du ministère des Affaires étrangères entre 1996 et 1999, sous la présidence du général Liamine Zéroual. Il avait auparavant été ambassadeur en ex-Yougoslavie, au Royaume-Uni et en Inde, entre autres. Il a ensuite été vice-ministre des Affaires étrangères, chargé des portefeuilles des affaires maghrébines et africaines, poste dans lequel il a admis avoir rédigé un rapport recommandant au président Zéroual de l'époque de fermer la frontière avec le Maroc - comme cela s'est produit en 1995 - et est donc perçu comme farouchement anti-marocain. 

Le retour d'Ataf au ministère des Affaires étrangères, deux décennies plus tard, ne changera pas la direction qu'a prise la politique étrangère de l'Algérie ces dernières années, qui a été façonnée depuis El Mouradia et toujours entre les mains du président, Abdelmadjid Tebboune, et, dans une moindre mesure, du chef d'état-major de l'armée, Saïd Chengriha. Mais il promet de combler certaines des lacunes laissées par son prédécesseur en termes de présence de l'Algérie dans le Golfe et dans le reste du monde arabe. 

Dans le passé, Ataf s'est montré particulièrement critique à l'égard de la position traditionnelle de l'Algérie vis-à-vis des États-Unis. Le nouveau ministre des Affaires étrangères estime que le fait d'éloigner l'Algérie de l'orbite américaine et de valider plutôt l'influence de la Russie a aidé le Maroc à gagner en influence à Washington, ce qui a abouti à la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental formalisée par l'administration Trump et maintenue plus tard par Biden.

Les États-Unis ont compris le message. La sous-secrétaire d'État Wendy Sherman a appelé mardi Ataf, nouvellement nommé, pour le féliciter de sa nomination. Les deux personnalités ont profité de l'occasion pour discuter des "efforts visant à promouvoir la stabilité dans la région, y compris le soutien à l'envoyé personnel du Secrétaire général de l'ONU Staffan de Mistura pour promouvoir une solution politique durable et digne au conflit du Sahara occidental", a indiqué le communiqué du Département d'État. 

Quelques jours plus tôt, le numéro deux du ministère algérien des Affaires étrangères, Ammar Blani, contraint d'assurer l'intérim après la disparition du démissionnaire Lamamra, avait reçu la visite de l'ambassadrice américaine à Alger, Elisabeth Moore Aubin.

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