Comment les marchés émergents combattent-ils la criminalité liée aux crypto-monnaies ?
Face aux niveaux records de criminalité liée aux crypto-monnaies, plusieurs marchés émergents cherchent des moyens de renforcer leurs protections dans ce domaine.
L'acceptation des crypto-monnaies augmente dans le monde entier, tout comme les risques associés à la criminalité liée aux crypto-monnaies.
Un montant record de 14 milliards de dollars en monnaies numériques a été transféré vers des adresses illicites l'année dernière, selon la plateforme de données blockchain Chainalysis, soit une hausse de 79 % par rapport aux 7,8 milliards de dollars enregistrés en 2020.
Les adresses illicites sont définies comme des comptes ou des portefeuilles liés à des activités criminelles telles que les ransomwares, les systèmes de Ponzi, les escroqueries ou d'autres formes de vol de crypto-monnaies.
Malgré cette augmentation de la cryptocriminalité, les transactions impliquant des adresses illicites en 2021 n'ont représenté que 0,15 % du volume total des transactions en crypto-monnaies, qui a lui-même augmenté de 567 % l'année dernière.
Toutefois, l'augmentation de ce type de crime est préoccupante, car l'adoption mondiale des crypto-monnaies continue de croître.
Les marchés émergents vont de l'avant avec la réglementation
En réponse au risque croissant de cryptocriminalité, plusieurs marchés émergents ont cherché à renforcer les protections.
Dans le classement des taux d'adoption en 2021 établi par Chainalysis, le Vietnam, l'Inde et le Pakistan se classent respectivement en première, deuxième et troisième position, les États-Unis étant la seule économie mature du top 10.
L'une des principales façons dont les gouvernements s'efforcent de renforcer les protections est de légiférer sur l'utilisation des crypto-monnaies. Bien qu'elles n'en soient qu'à leurs débuts, elles représentent une étape cruciale dans la réglementation du commerce des crypto-monnaies et la protection des consommateurs.
En septembre dernier, le Salvador est devenu le premier pays au monde à adopter le bitcoin, la crypto-monnaie la plus populaire au monde, comme monnaie légale, permettant aux résidents de l'utiliser dans toutes les transactions.
La loi sur les bitcoins du pays définit une série de règles concernant les échanges de bitcoins et leur taux de conversion avec le dollar américain, tandis que Chivo, le porte-monnaie électronique géré par l'État, offre aux résidents une plateforme sans commission pour les échanges.
Ailleurs en Amérique latine, le Brésil fait figure de pionnier régional. L'année dernière, la bourse brésilienne a lancé trois fonds négociés en bourse (ETF) dédiés aux crypto-monnaies, tandis qu'à la mi-février, le pays a également vu le lancement du premier ETF au monde dédié aux réseaux financiers décentralisés.
En termes de législation, en février, la commission des affaires économiques du Sénat a ouvert la voie à une réglementation plus large en approuvant à l'unanimité le projet de loi sur les crypto-monnaies du pays, qui sera débattu et voté d'abord au Sénat lui-même, puis à la Chambre basse.
Entre autres fonctions, le projet de loi définira les actifs virtuels, exposera les responsabilités des fournisseurs de services et déterminera l'agence qui appliquera la crypto-réglementation.
Pendant ce temps, dans un signe de réglementation accrue des crypto-monnaies à l'échelle mondiale, en décembre de l'année dernière, le Dubai World Trade Center a annoncé qu'il allait devenir une zone de crypto-monnaies et un régulateur des crypto-monnaies et autres actifs virtuels.
L'année dernière, la Bourse des Philippines a de même annoncé qu'elle cherchait à devenir une plateforme de négociation de cryptoactifs, bien qu'elle attende toujours la publication de règles sur la négociation de cryptoactifs.
De tous les grands événements géopolitiques de ces derniers temps, aucun n'illustre mieux les opportunités et les risques potentiels des cryptomonnaies que l'invasion en cours de l'Ukraine par la Russie.
Depuis le début de l'invasion le 24 février, l'Ukraine a ouvert la voie à l'adoption des cryptocurrences comme forme alternative de financement, dans un contexte d'inquiétudes concernant les transferts de devises traditionnelles et les retards dans les paiements conventionnels.
Déjà leader dans l'adoption des crypto-monnaies avant le conflit, le pays a mis en place au cours du mois dernier des portefeuilles officiels du gouvernement qui acceptent les paiements en crypto-monnaies, ainsi que la mise en œuvre de structures juridiques conçues pour stimuler l'industrie.
Ainsi, les échanges de crypto-monnaies peuvent désormais opérer dans le pays, la Banque nationale d'Ukraine et la Commission nationale des valeurs mobilières et des échanges étant désignées comme régulateurs.
En partie grâce à ces efforts, l'Ukraine a recueilli plus de 100 millions de dollars de dons en crypto-monnaies au cours du mois dernier. Bien que ce montant soit relativement faible par rapport aux milliards d'aide qu'elle a reçus des gouvernements et des organisations de développement, il a permis d'accéder rapidement à des fonds et d'acheter des produits de première nécessité tels que de la nourriture, des casques et des fournitures médicales.
Cependant, certains craignent également que les crypto-monnaies soient utilisées par le gouvernement russe et les personnes figurant sur les listes de sanctions pour échapper aux sanctions financières et commerciales internationales.
Les sanctions imposées au secteur bancaire russe ne couvrent pas les crypto-monnaies et, compte tenu du manque de collaboration internationale dans l'espace crypto, les chiffres du secteur suggèrent que, tout comme les crypto-monnaies sont utilisées pour aider l'Ukraine, elles pourraient également être utilisées pour financer l'armée russe.
