La Russie et la Chine réagissent au nouveau Concept stratégique de l'OTAN
Le nouveau Concept stratégique de l'OTAN, présenté au Sommet de Madrid, désigne pour la première fois la Chine comme l'une des principales menaces de l'Alliance. À son tour, la Russie, qui, dans le précédent concept, était définie comme un "partenaire potentiel", est devenue le plus grand problème pour la sécurité euro-atlantique après l'invasion de l'Ukraine et l'escalade des tensions avec l'Occident.
Les réponses de la Chine et de la Russie ont été rapides. Le Concept stratégique est le document qui est périodiquement renouvelé aux sommets de l'OTAN et qui définit les valeurs et les objectifs de l'OTAN à court et moyen terme.
Le président russe Vladimir Poutine a été le premier à commenter les progrès réalisés au sommet de Madrid lors d'une conférence de presse au Turkménistan, un pays situé dans la sphère d'influence de la Russie. Au départ, Poutine a clairement indiqué que l'adhésion de la Suède et de la Finlande n'était pas un problème pour la Russie, ce qui a imprégné les négociations, car s'il y avait de réels obstacles du côté de la Russie, les négociations avec la Turquie auraient été plus complexes. La Turquie et la Russie entretiennent des relations étroites dans le contrôle de conflits tels que celui de la Syrie. Lors de sa conférence de presse au Turkménistan, le dirigeant russe a haussé le ton en déclarant qu'"avant, il n'y avait pas de menace (concernant la Suède et la Finlande), alors que maintenant, si des contingents militaires et des infrastructures y sont déployés, nous devrons répondre de la même manière et créer les mêmes menaces pour les territoires à partir desquels des menaces sont créées à notre égard".
Poutine laisse ainsi entendre qu'il y aura une escalade militaire sur le flanc nord si des troupes de l'OTAN sont déployées en Finlande et en Suède. Les deux États membres de l'UE étaient déjà couverts par l'article 42.7 du traité sur l'Union européenne, qui prévoit une assistance militaire inconditionnelle à un État membre victime d'une agression armée. Mais l'articulation des moyens de l'OTAN est un pas de plus pour la Russie, qui ne veut pas voir la Finlande et la Suède dans une situation similaire à celle des pays baltes. La Finlande a une longue frontière commune avec la Russie, tandis que la Suède possède l'île stratégique de Gotland, qui pourrait raviver la militarisation de la guerre froide.
Du côté chinois, l'ambassadeur de la Chine auprès de l'UE, Zhang Ming, a répondu aux questions des journalistes en condamnant les nouveaux termes dans lesquels le Concept stratégique s'adresse à la Chine. "Le soi-disant Concept stratégique de l'OTAN, rempli d'idées de la guerre froide et de préjugés idéologiques, attaque et discrédite malicieusement la Chine. Nous nous y opposons fermement", a répondu Zhang Ming lors d'une conférence de presse.
La Chine est depuis longtemps le principal adversaire des États-Unis pour la suprématie mondiale. Le conflit entre les deux puissances s'est déplacé sur le théâtre du Pacifique en particulier, où la Chine s'étend progressivement grâce au développement des pays insulaires et de son économie. De leur côté, les États-Unis ont réorienté la stratégie militaire des pays anglo-saxons à travers l'alliance AUKUS, reléguant le Moyen-Orient aux puissances régionales (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Israël) et l'Europe à l'UE et à l'OTAN.
"Nous demandons instamment à l'OTAN de cesser de provoquer la confrontation en traçant des lignes idéologiques, d'abandonner la mentalité de la guerre froide et l'approche du jeu à somme nulle, et de cesser de diffuser de la désinformation et des déclarations provocantes à l'encontre de la Chine. Étant donné que l'OTAN considère la Chine comme un "défi systémique", nous devons être très attentifs et réagir de manière coordonnée. Lorsqu'il s'agit d'actes contre les intérêts de la Chine, nous donnerons des réponses fermes et énergiques", a poursuivi l'ambassadeur chinois auprès de l'UE.
La colère du représentant chinois ne concerne pas seulement l'Alliance atlantique, mais aussi l'Union européenne, qu'il juge trop proche du bloc de l'OTAN et de ses politiques de confrontation. Le Parlement européen a adopté en session plénière, le 7 juin, un rapport selon lequel la Chine est considérée comme un défi pour la sécurité dans la région indo-pacifique. Alors que la Chine reste le principal partenaire commercial de l'UE, cette dernière s'est timidement rapprochée du gouvernement de l'île de Taïwan, que la Chine revendique pour la première fois, en envoyant une délégation de députés européens sur l'île le 3 novembre.
Au cours de la troisième semaine de juin 2022, la Chine a lancé son troisième porte-avions, le Fujian, le premier à être un produit national à 100 %. Cette nouvelle forteresse d'acier s'inscrit dans le plan de la Chine visant à renforcer sa présence militaire dans le Pacifique et à exercer une pression croissante sur Taïwan. Les analystes se demandent toujours si Taïwan serait capable de résister à un assaut militaire chinois, indépendamment de l'intervention de l'alliance AUKUS. Tous les signes indiquent cependant une longue bataille économique et diplomatique, comme c'est la norme dans la politique étrangère chinoise.
