Berlin tente de calmer une situation qui a été agitée par les récentes menaces du président turc Erdogan

L'Allemagne tente de rapprocher la Grèce et la Turquie

photo_camera PHOTO/Ministerio de Asuntos Exteriores de Turquía via REUTERS - Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, et son homologue grec, Nikos Dendias, lors d'une conférence de presse à Ankara, en Turquie, le 15 avril 2021.

Au milieu de la situation tendue entre Athènes et Ankara, Berlin est intervenu pour tenter de désamorcer les relations entre les deux pays. Le différend concernant la limitation de la zone économique exclusive de l'autre partie et l'exploration de gisements de gaz naturel s'est aggravé au point que la militarisation grecque des îles de la mer Égée a provoqué des menaces de la part du président turc Recep Tayyip Erdogan. La Turquie accuse les Grecs de "ne pas vouloir la paix", et l'Allemagne est intervenue en organisant une réunion de haut niveau pour servir de médiateur entre les Ottomans et les Grecs.

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Ibrahim Kalin, porte-parole de la présidence turque, Jens Ploetner, conseiller en politique étrangère et de sécurité auprès de la chancellerie allemande, et Anna-Maria Boura, chef du bureau diplomatique du Premier ministre grec, ont tenu une réunion à Bruxelles pour rapprocher les deux parties et faciliter la communication. Toutefois, aucune information n'a été publiée sur les sujets abordés lors de la réunion, bien qu'il semble que les récentes menaces d'Erdogan concernant l'utilisation éventuelle du missile balistique Tayfun aient suscité des inquiétudes chez les Grecs.
 
Il y a plusieurs raisons à la colère de la Turquie. Les accords entre les deux pays stipulaient que les îles devaient rester démilitarisées, et le ministre turc des Affaires étrangères Melvut Çavusoglu estime que "la Grèce ne veut pas la paix parce qu'elle viole les accords de paix". Il a en outre exigé qu'Athènes "fasse un pas en arrière", faute de quoi Ankara remettrait en question la souveraineté grecque sur ce territoire. "Les îles militarisées par la Grèce ont été données avec les accords de Lausanne et de Paris, et elles ont été données à la Grèce à une condition : la Grèce ne peut pas militariser ces îles".

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Ces déclarations de Cavusoglu font suite aux propos tenus par Erdogan en septembre, lorsqu'il a déclaré à plusieurs reprises que "nous pouvons venir, soudainement, une nuit", faisant référence à la possibilité de mener une opération militaire. Le traité de Lausanne de 1923, que la Turquie invoque pour dénoncer la militarisation de la Grèce, stipule que les îles de Lesvos, Samos, Chios et Ikaria ne peuvent avoir aucune fortification ou base navale. En outre, les îles du Dodécanèse, dans le sud de la mer Égée, doivent être "démilitarisées" en vertu du traité de Paris.
 
Et comme si cela ne suffisait pas, les dernières nouvelles en provenance d'Ankara ne font qu'éloigner davantage les deux parties, le ministère turc de la Défense ayant annoncé mardi que les forces aériennes turques avaient été harcelées par des avions de chasse F-16 grecs. Les avions turcs faisaient partie des missions " Nexus Ace Ege " de l'OTAN et, selon le ministère, ont répondu immédiatement aux chasseurs, qui ont décollé de cinq aéroports situés sur le territoire grec.

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De plus, tous les alliés de l'OTAN sont informés de l'opération, y compris la Grèce, ce qui rend le malaise turc d'autant plus grand que les Grecs sont apparemment au courant des manœuvres ottomanes. De son côté, Athènes n'a pas commenté cet aspect, mais elle a commenté les accusations turques de présence militaire sur les îles. "Les déclarations des responsables turcs sur la démilitarisation des îles de la mer Égée ont été rejetées à plusieurs reprises dans leur intégralité sur la base d'un certain nombre d'arguments, qui figurent également dans les lettres pertinentes que la Grèce a envoyées au secrétaire général des Nations unies", indique le communiqué publié début décembre par le ministère grec des Affaires étrangères.

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L'intention allemande est donc d'établir un début de rapprochement entre deux pays qui, loin de voir une solution à leur éloignement en vue, continuent de s'éloigner à chaque action. Même les déclarations du chancelier allemand Olaf Scholz exhortant la Turquie à mettre fin à ses menaces n'ont pas réussi à empêcher le camp d'Erdogan de le faire. Les observateurs estiment qu'il est difficile de voir une amélioration dans ce contexte en raison des élections de l'année prochaine dans les deux pays.
 
En outre, James Tessmann, responsable du bureau d'Istanbul de la Stiftung Mercator, estime que "l'Allemagne a perdu sa crédibilité en tant que médiateur après la dernière visite de la ministre allemande des affaires étrangères Annalena Baerbock en Turquie et en Grèce". "Cavusoglu l'a même accusée de partisanerie". Et ce, bien que la Turquie soit l'un des pays extérieurs à l'UE avec lequel l'Allemagne entretient les meilleures relations, d'où les efforts de Berlin pour remettre les relations turco-grecques sur les rails, même si, pour l'instant, une résolution ne semble pas facile, et encore moins proche.

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