Doha se positionne comme un partenaire clé de l'Occident, supplantant les autres puissances régionales. En plus de son rôle de médiateur avec Téhéran, le GNL qatari apparaît comme une alternative au gaz russe en Europe

L'émir du Qatar se rendra en Iran et en Europe dans le but de relancer l'accord nucléaire

PHOTO/REUTERS - L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad al-Thani

L'émir du Qatar, Tamim bin Hamad al-Thani, se rendra jeudi en Iran pour rencontrer le président Ebrahim Raisi, selon l'agence de presse iranienne IRNA. Ce voyage, selon les médias iraniens, aura pour but de "renforcer les liens" entre les deux pays. Par ailleurs, selon l'IRNA, les moyens de débloquer les avoirs iraniens gelés dans des banques étrangères en raison des sanctions américaines seront discutés lors de la visite de l'émir qatari.

En début de semaine, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Saeed Khatibzadeh, a annoncé que Al-Thani se rendrait "bientôt" dans le pays. "La visite de l'émir du Qatar à Téhéran est à l'ordre du jour et comprend des questions bilatérales, régionales et internationales. Après ce voyage, le président iranien se rendra dans un pays du Golfe", a déclaré le porte-parole iranien. L'émir qatari, quant à lui, après cette visite en Iran, se rendra en Allemagne, au Royaume-Uni et dans d'autres États européens dans le but de "relancer l'accord de 2015 sur le nucléaire iranien" et d'aborder la sécurité énergétique en Europe, rapporte Reuters. 

PHOTO/Majid Asgaripour/WANA (Agencia de Noticias de Asia Occidental) vía REUTERS -  Ebrahim Raisi

La dernière fois que l'émir du Qatar s'est rendu à Téhéran, c'était au début de 2020 pour tenter de désamorcer les tensions entre l'Iran et les États-Unis après l'assassinat du commandant Qassem Soleimani. Le motif de cette visite est tout autre, même si elle vise également à rapprocher le régime iranien et l'Occident.

Doha se positionne ainsi comme un médiateur entre l'Iran et les autres membres du JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action), qui cherchent à trouver un accord avec Téhéran pour limiter son programme nucléaire. Une source a déclaré à Reuters que le voyage de l'émir visait à amener les parties au pacte nucléaire à un "nouveau terrain d'entente".

Delegación de la UE en Viena via REUTERS  -   El secretario general adjunto del Servicio Europeo de Acción Exterior (SEAE), Enrique Mora, y el adjunto iraní del Ministerio de Asuntos Exteriores, Abbas Araghchi, en el inicio de una reunión de la Comisión Conjunta del JCPOA en Viena

Les pourparlers de Vienne se sont enlisés en raison de profonds désaccords entre Téhéran et Washington. L'Iran demande aux États-Unis de retirer le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) de la liste des organisations terroristes étrangères. De même, le régime iranien insiste pour que l'administration américaine lève les sanctions contre le pays.

En plus de ces désaccords, la situation en Europe n'est pas propice à la conclusion d'un accord. Récemment, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a déclaré qu'une "pause" dans les négociations de Vienne était "nécessaire" en raison de "facteurs externes", rapporte Europa Press. La Russie, actuellement sous le coup de sanctions occidentales pour son invasion de l'Ukraine, est l'une des nations en négociation. 

AFP PHOTO / HO / LEADER.IR - Una imagen de la oficina del líder supremo de Irán, el ayatolá Ali Khomenei, en una reunión con el emir de Qatar, el jeque Tamim bin Hamad al-Thani, en la capital iraní, Teherán, el 12 de enero de 2020.

Cherchant à relancer l'accord nucléaire et se positionnant comme médiateur entre les parties au JCPOA, le Qatar est un allié occidental clé dans la région. À ce rôle d'intermédiaire, il faut ajouter le potentiel du Qatar en matière de gaz naturel liquéfié (GNL) comme alternative au gaz russe en Europe. L'agenda d'Al-Thani en Europe comprend également la sécurité énergétique du continent. À cet égard, l'Allemagne, qui est l'un des principaux clients de la société russe Gazprom, a resserré ses liens avec le Qatar pour tenter de se libérer de sa dépendance à l'égard de Moscou. La Pologne est un autre pays qui, depuis des années, se tourne vers la nation du Golfe plutôt que vers son grand voisin de l'Est.

PHOTO/REUTERS - El qatarí de gas natural licuado (GNL) DUHAIL cruza el Canal de Suez

C'est pour cette raison que les États-Unis ont désigné le Qatar comme un "allié majeur" en dehors de l'OTAN au début du mois de février. La décision de Washington intervient à un moment où ses relations avec Riyad et Abu Dhabi ne sont pas au beau fixe. Les États-Unis ont appelé les puissances pétrolières du Golfe à augmenter leur production de pétrole afin de faire baisser les prix du pétrole, mais l'OPEP, dont la Russie est également membre, a ignoré les appels de Washington. En outre, l'administration de Joe Biden a cessé de soutenir les opérations offensives de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite au Yémen et a imposé des conditions aux ventes d'armes américaines aux États du Golfe, ce que Riyad considère comme un signe du manque d'intérêt de Washington pour la région

AP/ALEX BRANDON - El presidente Joe Biden habla durante una reunión con el emir de Qatar, el jeque Tamim bin Hamad Al Thani, en el Despacho Oval de la Casa Blanca, el lunes 31 de enero de 2022, en Washington

Alors que les relations entre Riyad et Washington se refroidissent, Doha se positionne comme le nouveau partenaire régional. Ce rapprochement a atteint son apogée après le retrait des troupes d'Afghanistan en raison du rôle joué par le Qatar dans les évacuations. Quelques mois plus tard, le ministre qatari des Affaires étrangères, Sheikh Mohammed bin Abdulrahman Al Thani, et le secrétaire d'État Antony Blinken ont signé des accords stratégiques dans lesquels Doha assumait le rôle de "puissance protectrice" des intérêts américains en Afghanistan. "Le Qatar est un partenaire crucial dans la promotion de la stabilité régionale", a déclaré Blinken. Le Qatar a précédemment joué le rôle de médiateur dans les pourparlers entre les États-Unis et les talibans, qui ont abouti aux accords de Doha signés en février 2020. 

AP/OLIVIER DOULIERY - El Secretario de Estado Antony Blinken estrecha la mano del Ministro de Asuntos Exteriores de Qatar, Sheikh Mohammed bin Abdulrahman Al Thani, durante una conferencia de prensa tras una ceremonia de firma en el Departamento de Estado en Washington, el viernes 12 de noviembre de 2021
Téhéran cherche à renforcer sa coopération avec le Qatar quelques jours après avoir accueilli le président syrien

L'IRNA a également indiqué que la prochaine visite de l'émir qatari "permettra d'assurer le suivi des récents accords et d'élargir les liens bilatéraux, notamment la coopération pour l'organisation de la Coupe du monde 2022". Ces traités ont été signés lors de la visite de Raisi au Qatar en février dernier. Doha et Téhéran ont convenu de coopérer sur les questions liées à la compétition qui se tiendra plus tard cette année. Comme l'a déclaré à l'IRNA le président de la Chambre de commerce mixte Iran-Qatar, Adnan Musapur, le secteur privé iranien "est prêt à offrir des services d'hébergement, à fournir et à répondre à la demande du Qatar pendant la Coupe du monde".

Musapur a également noté que Téhéran et Doha prévoient d'augmenter les vols directs de plusieurs villes iraniennes vers le Qatar pendant le tournoi. Par conséquent, lors de la prochaine visite d'Al-Thani, ils passeront en revue les accords signés et tenteront d'atteindre "le stade de la mise en œuvre et de fournir les conditions dans ce domaine". 

AFP/ ATTA KENARE  -   El presidente de Irán, Ebrahim Raisi, habla ante el Parlamento en la capital, Teherán

Raisi recevra l'émir qatari quelques jours après avoir rencontré le président syrien Bashar al-Assad. Téhéran et Damas sont liés par leur forte inimitié envers Israël. En effet, lors de sa visite en Iran, le dirigeant syrien a fait l'éloge des "liens stratégiques entre l'Iran et la Syrie" qui ont "empêché le régime sioniste [d'Israël] de dominer la région". Raisi, pour sa part, a déclaré que la priorité de son gouvernement était de renforcer les liens stratégiques avec la Syrie, rapporte l'agence de presse Tasnim.

Il s'agissait de la deuxième visite d'el-Assad en Iran depuis le début de la guerre civile syrienne en 2011. La dernière visite du dirigeant syrien à Téhéran remonte à février 2019.

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