L'Iran graciera les personnes arrêtées lors de manifestations si elles signent une "déclaration de repentance"
Les manifestations qui ont débuté en octobre de l'année dernière à la suite de l'assassinat de Mahsa Amini ont laissé des dizaines de milliers de personnes détenues en Iran après la répression policière. La violence des forces armées de Téhéran a suivi la ligne que la dictature avait utilisée en de précédentes occasions face à de telles protestations, bien que cette fois-ci le leader suprême ait décidé d'accorder une grâce à de nombreux détenus. Toutefois, pour pouvoir bénéficier d'un pardon, une "déclaration de repentir et un engagement écrit à ne pas répéter une infraction similaire" seront requis.
Il s'agit d'un changement important par rapport à la position ferme du régime depuis le début des protestations il y a un peu plus de quatre mois. Toutefois, si l'on se place dans une perspective historique, cette annonce n'est pas aussi surprenante qu'il n'y paraît. Le 11 février marque l'anniversaire de la révolution islamique de 1979, et il semble que le Guide suprême Ali Khamenei ait pris l'habitude d'accorder sa grâce à certains prisonniers à la veille de cette célébration, profitant de cette occasion pour mettre en lumière les personnes arrêtées pendant les manifestations.
Les médias iraniens ont rapporté que "les prisonniers qui ne sont pas accusés d'espionnage pour des agences étrangères, de contact direct avec des agents étrangers, de meurtre, de destruction et d'incendie de biens publics seront graciés". Sans en donner le nombre exact, les mêmes médias suggèrent qu'il pourrait y en avoir "des dizaines de milliers", bien qu'aucun détenu ayant la double nationalité ne soit libéré.
Cette vague de grâces est précédée d'une lettre du chef du pouvoir judiciaire, Gholamhossein Mohseni Ejei, dans laquelle il affirme que de nombreux détenus sont des jeunes qui ont été influencés par la propagande étrangère : "Au cours des récents événements, plusieurs personnes, en particulier des jeunes, ont commis des actes répréhensibles et des crimes en raison de l'endoctrinement et de la propagande de l'ennemi". Cela renforce le message de Téhéran, depuis le début des manifestations, selon lequel l'origine des protestations était une campagne orchestrée de l'extérieur.
Le chef du pouvoir judiciaire insiste d'ailleurs sur cette idée dans la lettre envoyée à Ali Khamenei, affirmant que "les plans des ennemis étrangers des courants anti-révolutionnaires ont été déjoués", tout en assurant que "ces jeunes gens regrettent désormais leurs actes". En outre, les canaux officiels du gouvernement iranien ont souligné que "ceux qui n'expriment pas de regret pour leurs activités et ne s'engagent pas par écrit à ne pas répéter ces activités ne seront pas graciés".
Selon l'Iran Human Rights Group, basé en Norvège, plus de 100 personnes risquent la peine de mort. À ce jour, quatre personnes ont déjà été exécutées par le régime, ce qui a entraîné une baisse drastique du nombre de manifestants dans les rues iraniennes. Cette mesure, ainsi que l'annonce des grâces, devraient mettre fin à la crise qui a débuté en octobre. Cependant, les militants des droits de l'homme ont rapidement réagi à cette décision, affirmant que "le pardon hypocrite de Khamenei ne change rien", selon l'organisation.
Le groupe estime à 500 le nombre de manifestants tués - dont 70 mineurs - au cours des protestations, des vies qui ne seront pas affectées par une mesure dont le seul but est de contrôler à nouveau une population qui est sous la coupe de la dictature des ayatollahs depuis 44 ans. Le nombre de détenus s'élève à 20 000, chiffre qui devrait diminuer lorsque l'amnistie et les réductions de peine annoncées par le guide suprême à la veille de l'anniversaire de la Révolution islamique prendront effet.
