Le président chinois atterrira à Moscou lundi pour une visite de trois jours qui mettra en évidence son alliance avec Poutine

Xi Jinping confirme sa visite en Russie, alors que les premières indications font état de livraisons d'armes

photo_camera PHOTO/AP - Le président russe Vladimir Poutine (à droite) et le président chinois Xi Jinping (à gauche) au Kremlin à Moscou, sur cette photo d'archive

Xi Jinping atterrira à Moscou la semaine prochaine. Le président chinois entamera lundi une visite officielle de trois jours en Russie afin de rencontrer son homologue Vladimir Poutine. La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Hua Chunying, a confirmé ce voyage, attendu depuis janvier et annoncé quelques heures plus tôt par le Kremlin. Il s'agira de la première visite officielle du dirigeant chinois en Russie depuis quatre ans, un mois après le premier anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Sa dernière visite remonte à 2019, dans le cadre du Forum économique international de Saint-Pétersbourg. 

La visite mettra en scène la symbiose entre la Chine et la Russie dans le contexte de la guerre. Pour l'heure, Pékin maintient une ambiguïté stratégique afin de s'ériger en médiateur, un objectif pour lequel il a gagné en crédibilité après avoir parrainé le dégel diplomatique entre l'Iran et l'Arabie saoudite. Le géant asiatique a défendu l'intégrité territoriale de l'Ukraine, mais n'a pas condamné l'agression de la Russie. En ce sens, ses intérêts ont largement convergé avec ceux de Moscou, avec qui il affirme entretenir une "amitié sans limites". 

C'est la première fois que Poutine et Xi se rencontrent en personne depuis septembre. Leur dernière rencontre a eu lieu dans la ville ouzbèke de Samarkand, à l'occasion du sommet annuel des chefs d'État de l'Organisation de coopération de Shanghai, dont les deux pays sont membres. En décembre, ils se sont entretenus par vidéoconférence. Le président russe avait alors invité son homologue chinois à se rendre dans son pays afin de "démontrer au monde entier la force des liens russo-chinois". Xi a accepté.

Xi Jinping Vladímir Putin

Il est prévu qu'ils discutent de nouveaux moyens de renforcer leurs "relations de partenariat global et leur coopération stratégique", a déclaré le Kremlin dans un communiqué repris par l'agence de presse étatique TASS. Plusieurs documents bilatéraux pertinents seront également signés, selon Reuters. Mais les discussions porteront sur l'évolution de la guerre en Ukraine, où la Chine souhaite jouer un rôle d'intermédiaire. C'est pourquoi, un jour avant de confirmer la visite de Xi en Russie, son nouveau ministre des affaires étrangères, Qin Gang, a eu une conversation téléphonique avec son homologue ukrainien, Dmitry Kuleba. 

Qin lui a dit que la Chine espérait que les parties garderaient les canaux de dialogue ouverts et ne se fermeraient pas à la recherche d'une solution politique. "Nous pensons toujours que le dialogue politique est le seul moyen de résoudre les conflits et les différends. Montrer des épées, des sanctions unilatérales et des pressions extrêmes ne fera qu'intensifier les contradictions et accroître les tensions, ce qui n'est pas conforme aux intérêts et aux attentes de la plupart des pays du monde", a déclaré le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi. 

Il y a quelques semaines, Pékin a présenté une proposition de paix en 12 points pour mettre fin à la guerre en Ukraine. Dans ce document, la diplomatie chinoise prône notamment le respect de la souveraineté des pays, mais n'envisage pas le retrait des troupes russes d'Ukraine ni la restitution de la péninsule de Crimée à Kiev ; elle appelle également à "abandonner la mentalité de la guerre froide", un postulat qui condamne implicitement l'expansion de l'OTAN vers l'Est, l'un des principaux arguments avancés par le Kremlin tout au long de cette période pour justifier l'invasion. Les pays occidentaux l'ont déclaré partiel et insuffisant, mais Xi a l'intention de défendre le texte.

Putin Wang Yi

Le président chinois prévoit de s'entretenir par vidéoconférence avec son homologue ukrainien, Volodymir Zelenski, dans les prochaines semaines. Kiev est ouvert à entendre ce que Pékin a à dire, mais le gouvernement chinois n'a pas encore confirmé ses intentions. Yi insiste sur le fait que la Chine "maintiendra sa position objective et équitable sur les questions internationales et régionales brûlantes, telles que la crise en Ukraine, et continuera à jouer un rôle constructif dans la résolution politique de la crise". 

Le gouvernement chinois affirme avoir maintenu une position neutre. Entre-temps, la Chine est devenue un soutien économique pour la Russie. Pékin est aujourd'hui le premier importateur de pétrole russe, le deuxième importateur de gaz par canalisation et le quatrième importateur de gaz naturel liquéfié. En retour, le géant asiatique est devenu la première source d'importation du pays eurasien. Il s'agit plus précisément de semi-conducteurs, un matériau dont le Kremlin a besoin pour fabriquer des équipements civils et militaires. Ce facteur explique pourquoi le commerce bilatéral a augmenté de plus de 30 % au cours de l'année 2022. Il s'agit de niveaux record.

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Armes chinoises en Russie 

L'équidistance calculée est cependant peu crédible. Selon une enquête de Politico, un certain nombre d'entreprises chinoises, dont China North Industries Group Corporation Limited, l'un des plus grands entrepreneurs militaires du pays, ont expédié 1 000 fusils d'assaut et d'autres équipements susceptibles d'être utilisés à des fins militaires, y compris des pièces de drones et des gilets pare-balles, à plusieurs entreprises russes entre juin et décembre de l'année dernière. Les médias américains rapportent que ces livraisons auraient été effectuées par l'intermédiaire de sociétés en Turquie et aux Émirats arabes unis. 

La Chine fournirait des équipements à double usage à des entreprises russes, sans que l'on sache si ces importateurs ont l'intention d'utiliser la technologie à des fins militaires. L'un des acheteurs est Tekhkrim, une société qui a conclu des contrats avec l'État et l'armée russes. Les équipements à double usage pourraient donc être un moyen subreptice d'aider la Russie à contourner les représailles des alliés occidentaux. Ce serait la première confirmation que Pékin fournit des armes aux troupes russes. Le directeur de la CIA, William Burns, a pour la première fois mis en garde contre cette possibilité il y a quelques semaines.