L'Arabie saoudite est à l'origine d'une paix imminente au Yémen

Un moment historique pour le Yémen. Le pays, qui est le théâtre de la plus grande catastrophe humanitaire au monde, pourrait parvenir à la paix dans les prochaines semaines après plus de neuf ans d'une guerre civile dévastatrice et ininterrompue. Des pourparlers visant à mettre fin aux hostilités entre les Yéménites et les Houthis ont déjà lieu à Sanaa, mais cette fois, c'est l'Arabie saoudite qui mène les négociations les plus prometteuses depuis le début de la guerre en 2014.
L'image clé s'est produite au palais républicain de la capitale yéménite, le fief du groupe rebelle chiite. Le chef du Conseil politique suprême des Houthis, Mahdi al-Mashat, y a reçu une délégation saoudienne menée par l'ambassadeur du royaume au Yémen, Mohamed al-Jaber, et une délégation omanaise, le voisin et traditionnel interlocuteur dans les conflits du Golfe.

Les propositions de paix sont claires. L'accord prévoit l'augmentation du nombre de vols vers l'aéroport de Sanaa, la reprise des exportations de pétrole à partir des ports du pays, l'ouverture des routes dans la province de Taiz, la libération de tous les prisonniers et le transport des marchandises directement vers le port d'Aden. Les propositions faites précédemment par les "partisans de Dieu" autoproclamés concernant le paiement des salaires des fonctionnaires, les compensations économiques, la fin complète de "l'occupation saoudienne" et la reconstruction du pays doivent encore être négociées.
Les efforts saoudiens ont été salués par l'ONU comme étant "les plus proches du Yémen d'un réel progrès vers une paix durable" entre les rebelles houthis soutenus par l'Iran qui ont pris le pouvoir en 2014 et le gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale, qui a toujours été soutenu par Riyad. Une paix imminente qui, si elle se concrétise, pourrait être annoncée avant la fête musulmane de l'Aïd al-Fitr, le 20 avril, qui marque la fin du ramadan.

L'Arabie saoudite prend d'assaut le Moyen-Orient. Dans le cadre d'un nouveau réalignement de la politique étrangère, l'homme fort du Royaume, Mohammed bin Salman, a dépoussiéré l'ancienne politique d'apaisement pour mettre fin aux conflits latents. Ces dernières semaines, Riyad a repris ses relations avec la Syrie de Bachar el-Assad et avec son ennemi régional acharné, la République islamique d'Iran d'Ali Khamenei, acteur clé dans la conclusion d'accords dans d'autres scénarios, comme le Liban et l'Irak. Et tout cela avec un objectif clair : la diversification de l'économie du Royaume.
La Vision saoudienne 2030 est le cadre stratégique du pays pour réduire sa dépendance au pétrole et rechercher d'autres alternatives économiques. Mais pour la stabilité du marché, la pacification de la région est fondamentale, et c'est précisément ce à quoi travaille la Chine de Xi Jinping, notamment pour le grand projet de la Nouvelle route de la soie. La graine de la paix, qui a porté ses premiers fruits dans les accords entre Riyad et Téhéran à Pékin, devrait maintenant germer au Yémen. La fin des hostilités dans ce pays du Golfe constituerait à son tour un triomphe irrémédiable de la politique actuelle de la Chine face à des États-Unis dépassés.

Les États-Unis connaissent depuis longtemps une prise de distance progressive avec le Moyen-Orient, notamment depuis l'arrivée de Joe Biden dans le bureau ovale. Le froid suscité par l'affaire Khashoggi et l'accusation de "paria" portée par le démocrate à l'encontre du prince héritier ont contribué à ce que MBS déplace ses pions dans une autre direction, en commençant par refuser la demande de Washington d'augmenter la production de pétrole pour faire face à la crise déclenchée par l'invasion de l'Ukraine par la Russie. La visite de Joe Biden à Riyad n'a pas non plus eu beaucoup d'impact politique.
Toutefois, les États-Unis sont conscients de la nouvelle politique au Moyen-Orient et, surtout, des efforts saoudiens pour ramener la paix au Yémen. Le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, s'est entretenu avec Mohammed bin Salman mardi et lui a dit que Washington "saluait les efforts extraordinaires de l'Arabie saoudite pour parvenir à une feuille de route plus complète afin de mettre fin à la guerre" et offrait "le soutien total des États-Unis à ces efforts".
Ces félicitations n'enlèvent rien au fait que les États-Unis veulent toujours être présents sur la scène. L'envoyé spécial américain pour le Yémen, Tim Lenderking, se rendra dans la région pour rencontrer "les partenaires yéménites, saoudiens et internationaux afin de discuter des mesures nécessaires pour garantir un cessez-le-feu durable et un processus politique inclusif sous l'égide des Nations unies". Pour l'instant, la paix au Yémen n'est pas une voie à double sens.